lundi 17 mai 2010

CR du Buffet Littéraire du 6-5-10

Compte-rendu du buffet littéraire du 6 mai 2010 (Brigitte)


Avertissement : tous les textes lus durant la soirée ne figurent pas dans ce compte-rendu, n’y voyez pas d’intention sélective de ma part, mais plutôt la contrainte du temps. Cela dit, si certains de nos lecteurs veulent faire partager leur lecture, qu’ils n’hésitent pas à les diffuser sur la liste des participants au buffet littéraire


Nous sommes le 6 mai 2010, jour du buffet littéraire chez François, nous sommes peu (9) mais nous sommes bien.
Le thème : la bouffe et la littérature
Des mets tout à fait convenable nous permettent de nous mettre dans l’ambiance :
- Salade de riz aux encornets
- Salade périgourdine
- Plateau de fromage
- Desserts multiples : Financier – Flaps Jacks- Marquis praliné- Tarte aux pommes. Tout cela délicieux
Les textes maintenant :
François commence, il nous lit un très beau texte de Prévert : La grasse matinée. Une écriture qui rappelle un peu la sienne.
Il s’agit de nommer les maux de la faim par les mots, la détresse.

Rached prend la suite et nous lit un texte que François a reconnu, une nouvelle de Raymond Carver traduit par François Lascain : Tais-toi, je t’en prie. Il a choisi de nous lire Obèse.
Notre ami fait des progrès en lecture pour notre plus grand plaisir, il s’en est d’ailleurs félicité lui-même. Écriture très intéressante, particulière, prenante.

Brigitte prend la suite et lit certains passages du début du livre d’Amélie Nothomb : La métaphysique des Tubes. Texte autobiographique chargé de sens et apprécié à l’unanimité alors que beaucoup disait ne pas apprécier cette écrivaine. Seule Amélie Nothomb a magistralement décrit cette naissance à la conscience par la découverte du plaisir gustatif, en substituant de façon habile à la blancheur du lait maternel, habituellement le symbole de la nourriture primaire et première, la blancheur d’un morceau de chocolat blanc. « En un soubresaut de courage, il attrape la nouveauté avec ses dents, la mâche mais ce n’est pas nécessaire, ça fond sur la langue, ça tapisse le palais, il en a plein la bouche – et le miracle a lieu. La volupté lui monte à la tête, lui déchire le cerveau et y fait retentir une voix qu’il n’avait jamais entendue : - C’est moi ! C’est moi qui vis ! C’est moi qui parle ! Je ne suis pas ‘il’ ni ‘lui’, je suis moi ! »
François nous aménage un intermède en nous lisant un passage du texte de Flaubert : Salammbô. Grandiose.

Patrick prend la suite et nous voyager, grâce à sa voix mise au service de 2 poésies magnifiques de Rimbaud : Au cabaret vert, mais surtout :
Fêtes de la faim
Ma faim, Anne, Anne,

Fuis sur ton âne.


Si j'ai du goût, ce n'est guère

Que pour la terre et les pierres.

Dinn ! dinn ! dinn ! dinn ! Mangeons l'air,

Le roc, les charbons, le fer.


Mes faims, tournez. Paissez, faims,

Le pré des sons !

Attirez le gai venin

Des liserons ;


Mangez

Les cailloux qu'un pauvre brise,

Les vieilles pierres d'église,

Les galets, fils des déluges,

Pains couchés aux vallées grises !


Mes faims, c'est les bouts d'air noir ;

L'azur sonneur ;

C'est l'estomac qui me tire.

C'est le malheur.


Sur terre ont paru les feuilles !

Je vais aux chairs de fruit blettes.

Au sein du sillon je cueille

La doucette et la violette.


Ma faim, Anne, Anne !

Fuis sur ton âne.

Catherine nous lit un texte de Marguerite Duras : La cuisine de Marguerite aux Editions Jacob.
Ainsi, pour Marguerite Duras, au-delà de l’identité administrative, française, son enfance, ancrée dans la terre vietnamienne, lui a forgé un palais aux sensibilités plus asiatiques qu’européennes.

Patricia nous a lu quelques passages de : Les miscellanées culinaires de Mr Schott Ed : Ben Schott.
En voici quelques-unes :
J’adore la cuisine chinoise
J’adore le n°27

À partir d’un certain âge, on se regarde moins dans le dos de la cuillère.

Pour bien manger en Angleterre il faut prendre 3 petits déjeuners

La période critique dans le mariage, c’est l’heure du petit déjeuner.

Isabelle nous dit être très intéressé par l’origine de certains mots anglais d’origine française et vice-versa.
Exemple : breakfast : couper le jeûne et déjeuner : casser le jeûne

Patricia continue : Les gourmands creusent leurs tombes avec leurs dents.

Un des inconvénients du vin, c’est faire prendre les mots pour des pensées.

Le concombre est un légume qu’il faut bien émincer, assaisonner avec du poivre et du vinaigre, puis jeter aussitôt car il ne vaut rien du tout.

François nous lit avec sa voix gargantuesque un passage de L’Assommoir de Zola. C’est énorme, truculent, ça dégouline, ça éructe et ça « pête ».

Brigitte et oui encore elle pour une fois, lit un passage de Zazie dans le métro de Raymond Queneau.
Raymond Queneau avec une verve délectable, met en scène, la gouailleuse Zazie, qui se jette dans l’univers parisien avec voracité. « Les moules servies, Zazie se jette dessus, plonge dans la sauce, patauge dans le jus, s’en barbouille. Les lamellibranches qui ont résisté à la cuisson sont forcés dans leur coquille avec une férocité mérovingienne. Tout juste si la gamine ne croquerait pas dedans. Quand elle a tout liquidé, eh bien, elle ne dit pas non pour ce qui est des frites. [...] On apporte les frites. Elles sont exceptionnellement bouillantes. Zazie, vorace, se brûle les doigts, mais non la gueule. Quand tout est terminé, elle descend son demi-panaché d’un seul élan, expulse trois petits rots et se laisse aller sur sa chaise épuisée. Son visage sur lequel passèrent des ombres quasiment anthropophagiques s’éclaircit. Elle songe avec satisfaction que c’est toujours ça de pris.»
Symbole d’une étonnante vitalité, d’une étonnante indépendante, d’une étonnante liberté, Zazie, va déstabiliser la vie de toute personne qui l’approche comme elle dévore tout sur son passage. Son appétit gargantuesque déstabilise les rouages de la société, il est révolutionnaire et subversif. En affichant son appétit aussi bien alimentaire que sensuel, elle provoque la société bourgeoise de son époque, masculine et bien-pensante.

Et enfin, parce qu’il y a une « faim » François nous a lu 3 petits textes ciselés de son prochain livre : Le déplieur.
La crise, Le déplieur, Mine de rien.
LA CRISE ©
- La mer est bleue, le soleil est au zénith, les bateaux glissent sur l’eau, il y a même des enfants qui font des châteaux de sable, alors de quoi se plaint-on ?
- La crise.
- Je l’avais oubliée celle-là. On enlève quoi alors ? Les bateaux ? Le soleil ? Le bleu de la mer ? Pas les enfants tout de même ?
- Peut-être les châteaux de sable ?
LE DEPLIEUR ©
Quand on a pris le pli, ce n’est pas facile de se déplier. Tant qu’on ne s’en rend pas compte, pas de problème, on est dans son pli, tranquille, insouciant. C’est quand on se voit dans le miroir de la salle de bain que ça fait quelque chose, « mais t’es tout plié dans ton pli » se dit-on. Dès lors, soit on décide de rester comme ça, soit on décide de changer, de se déplier mais ce n’est pas facile car on est plié de pied en cap depuis si longtemps. On n’a plus qu’une solution : aller chez le déplieur en sachant que le résultat sera sans retour.
Raide à jamais on sera.

Mine de rien ©
- Rien que d’y penser ça me mine. Je vais essayer de ne plus y penser.
Un temps
- Ça ne marche pas.
- Et si tu y pensais comme ça, mine de rien ?
- Tu as raison, je vais essayer.
Un temps
On dirait que ça marche, c’est plus… comment dire ?
- Discret.
- Oui, c’est là quoi, tranquille, oui tranquille mais là, comme une musique de fond, ça fait partie du décor, c’est partout, ici, là, derrière, en dedans, un chuchotement, un murmure dans le creux, c’est ça, dans le creux, et ailleurs aussi et tout autour.
- Et ça ne t’empêche pas ?
- Heu, non, ça ne m’empêche pas.


Voilà, désolée j’ai été un peu longue mais cette soirée m’a inspirée.
À bientôt
Brigitte

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